22/04/2007

y a des jours comme ça, je le déteste...

repris tel que du blog de michel onfray...
Juste avant les jeux du cirque.

Juste avant les jeux du cirque.
Vendredi 20 avril 2007, 16h00.

La campagne officielle se termine. Les élections présidentielles sont donc finies. Dans quelques temps, nous aurons, comme prévu, un président, ou une présidente de la République libéral et, fors, le style, les choses continueront comme avant. De fait, sauf exception notable, José Bové ne sera pas présent au second tour, ni Arlette Laguiller. Si Le Pen s’y trouve, cela signifiera que l’autre candidat en lice sera élu au second tour dès le premier. Tablons donc sur Sarkozy, Royal ou Bayrou. Tiercé probable, ordre improbable. Or Nicolas, Ségolène et François, tous trois électeurs et militants du « Oui » au référendum que nous savons, reprendront le bâton de maréchal laissé par Chirac, ouiste lui aussi, qui le tenait d’un autre ouiste, Mitterrand, Grand Ouiste en Chef et patron de tous ces rejetons.
Grande perdante de ces élections, la gauche antilibérale dont le spectacle aura été pitoyable de bout en bout… Dernières nouvelles en date, José Bové veut bien, désormais, de l’alliance qu’il avait refusée il y a quelques jours à Olivier Besancenot, après avoir fait savoir, avant de se décider au combat in extremis, qu’il ne partirait pas pour une candidature de plus, puis de faire, comme les autres, une campagne autocentrée et méprisante pour les victimes du libéralisme qui seront les véritables laissées pour compte de ces minables combats de personnes. Car les « programmes », appelons ça comme ça faute de mieux, se distinguent à peine chez les cinq clients antilibéraux.
Avant-hier, hier, aujourd’hui, demain, après demain, une fois élu le chef d’Etat libéral, des hommes et des femmes coucheront encore sous les ponts, mourront de froid ; certains ne dîneront pas à leur faim ; leurs enfants demanderont à manger et les frigidaires seront vides ; des ouvriers se pendront dans leurs usines, leurs veuves resteront seules, misérables, endettées, avec leurs enfants en bas âge devant le cercueil de celui qui se sera passé une corde au cou et aura laissé une lettre expliquant qu’il n’en peut plus de cette vie d’esclave post-moderne ; des salariés verront leur entreprise fermées le petit matin où ils viendront reprendre leur travail ; en regardant par la fenêtre, ils découvriront que les patrons voyous ont fait déménager les machines dans la nuit pour les transférer au Portugal ; des femmes ne diront rien à leur mari, et profiteront de l’absence de leurs enfants partis à l’école pour chercher sur internet un homme en quête d’objet sexuel qui leur laissera en partant un billet de cinquante euros avec lequel elles achèteront à manger : ce soir-là , dans la cuisine, on mangera de la viande humaine ; elles pleureront toutes les larmes de leurs corps, en silence, sanglotant loin du monde, sans confident, sans confidente, violées mais contraintes à subir sans broncher, ni récriminer, par la pauvreté que leur inflige le système libéral ; des jeunes filles et des jeunes garçons renonceront aux études qu’ils escomptaient faire parce qu’ils n’auront pas les moyens de s’acquitter des frais d’inscription ou de payer le loyer d’un minuscule studio dans une ville universitaire, ni même de se nourrir faute de parents assez riches ; des personnes s’endetteront et contracteront un prêt dans une banque qui annoncera ses tarifs sans broncher afin de pouvoir payer un cercueil correct et un enterrement décent à leur père ou mère, grand père ou grand-mère ; on verra même un jeune homme creuser la fosse pour ensevelir son père dans le cimetière de son village afin d’alléger l’addition pendant que Noël Forgeard pourrait s’offrir tous les magasins français de Pompes Funèbres avec des indemnités versées pour le remercier d’avoir mis une entreprise sur la paille et des milliers d’ouvriers au chômage; des anonymes entreront dans une pharmacie et présenteront leur ordonnance renouvelée depuis des années pour acheter leurs anxiolytiques, leurs antidépresseurs, leurs somnifères, ils rentreront chez eux, ouvriront une bouteille de vin, regarderont la télévision en mangeant ; hagards , ils ne parleront ni à leur conjoint, ni à leurs enfants ; sur l’écran, on verra Nicolas Sarkozy, nouveau président de la république, annoncer qu’il faut travailler plus et plus longtemps, et plus dur, partir à la retraite bien plus tard, afin de pouvoir engraisser les riches insuffisamment gavés d’or, il parlera alors de « moderniser la France » ; des jeunes filles accepteront un mariage dans lequel l’amour comptera pour peu, elles feront semblant, mais on ne leur aura proposé aucun autre ascenseur social ; des enfants n’auront pas de lunettes, leurs parents cacheront leurs dents en mauvais état, la famille diminuera son espérance de vie car elle n’aura pas les moyens de consulter des médecins, des dentistes, des ophtalmologistes que droite et gauche autorisent à pratiquer le dépassement d’honoraires - quand elle ne leur permet pas d’utiliser les infrastructures publiques pour empocher des bénéfices bien privés ; des enfants tourneront le dos au savoir, à la culture, à l’intelligence, parce que l’école les en aura dégoûté, ils riront du bon élève, « l’intello », « le pédé », « le fayot », ils feront une moue de dégoût devant les livres et s’enorgueilliront de n’avoir jamais mis les pieds dans une bibliothèque ; les mêmes n’auront d’yeux que pour les footballeurs et les tarés de la Star Académie – qu’aime tant Laurent Fabius…- ces minables qui , grâce à la télévision libérale, incarnent l’horizon indépassable de leurs infime poignée de neurones ; apathiques, résignés, fatalistes, ils reverront sans haine le visage de ceux qui leur auront promis monts et merveilles pendant la campagne et qui, devenus ministres, premiers ministres, politiciens professionnels, continueront à séduire, parler, circonscrire, mentir, tout en appuyant sur l’accélérateur libéral ; l’opposition (libérale) fustigera la majorité politique (libérale) et, lors de la prochaine alternance ( libérale) , les opposants ( libéraux) devenus majoritaires ( libéraux) feront de même ; Le Pen et ses idées augmenteront, les bien pensants vociféreront : « le fascisme ne passera pas », BHL rédigera un Bloc-notes, et ses amis libéraux rajouteront une couche bréneuse de leur politique qui constitue un excellent fumier pour les fleurs vénéneuses du front National …
Je pourrais ainsi continuer longtemps ce portrait de la France méprisée, oubliée, négligée par les libéraux, certes, mais aussi par cette gauche anti-libérale qui a été bien plus soucieuse d’elle (logiques de partis, stratégies d’appareils, jeux de personnes, désir de leadership, foire égotiste et narcissique …) que des victimes du marché faisant la loi. En ce sens leur spectacle pitoyable, leur refus de forger une arme de combat efficace, a fait le jeu d’un Parti Socialiste qui n’a pas eu besoin d’aller chercher des voix de ce côté de l’échiquier et qui, dès lors, a dragué sur les terres de la droite – ordre juste et Marseillaise, drapeaux tricolores à domicile et encadrement militaire des « sauvageons », valeur-travail et valeur-famille à quoi il faut ajouter valeur-patrie… - ou du centre, au point que Bayrou a incarné magnifiquement le retour du refoulé de cette gauche de droite qui gouverne depuis 1983. Triomphe de Michel Rocard ! Donc de Mitterrand … Ultime coup de Jarnac des dévots du marché.
Devant l’étendue de ce gâchis, malheureusement, je vais donc voter contre : une fois contre le libéralisme dimanche prochain, une autre fois contre le libéralisme de droite- si la configuration le permet...- dimanche 6 mai. Mais ni l’un ni l’autre de ces deux votes ne me réjouit. C’est dégoûté, écoeuré, nauséeux que je vois cette consultation électorale s’approcher. Si peu d’idées, tellement de vent ! Tellement d’images ! Tellement de papier journal noirci ! Tellement de salive dépensée à la radio, à la télé ! Tellement de tracts et de prospectus ! A cette heure, je pense à Pierre Bourdieu et à son très grand livre La misère du monde.
Dans ce travail inexploité, il y avait pour une gauche radicale ( forte en éthique de conviction, mais pauvre en éthique de responsabilité utile pour infléchir vraiment le cours de la vie des victimes du libéralisme) et pour une gauche gouvernementale, ( faible en éthique de conviction, car tout entière vendue à l’éthique de responsabilité, - chez elle, l’autre nom du cynisme) , l’occasion d’une rencontre bien en amont pour un travail commun. Elle n’a pas eu lieu. Si elle n’a pas lieu bientôt, la rue fera la loi. Et là, le chef de l’Etat sécuritaire qui défendra le libéralisme depuis l’Elysée aura fort à faire. Les vendeurs de gaz lacrymogène vont faire fortune… Camarades libéraux, un conseil : achetez des actions chez nos amis gaziers !

1 Grains de sel:

Anonyme a dit…

Y a des jours comme ça, je l'adore