26/10/2007

grenelle de l'environ...

Le Munich de l'écologie



par Paul Ariès

26.10.2007



Nicolas Sarkozy parle de " révolution verte ".

Le patronat français, Medef et CGPME, se déclare grandement satisfait.

Les syndicats par la voix de François Chérèque saluent un processus

positif.
Corine Lepage (Modem et Cap 21) est aux anges.

Le parti socialiste applaudit les mesures annoncées par Nicolas

Sarkozy.
L'Union européenne se dit comblée par la voix de son Président....

Al Gore a passé commande d'un Grenelle mondial à Sarkozy.

Preuve que la vison sarkozyenne de l'écologie est bien mondialement

compatible sans rien changer à la puissance des grands groupes et aux

logiques économiques dominantes. Nous avions donc raison de dire lors

du contre-Grenelle de l'écologie le 6 octobre à Lyon que si le

Grenelle sera sarko-compatible, le sarkozysme n'est pas, lui,

écolo-compatible.
Nicolas Hulot a finalement bien mérité de TF1 et du sarkozysme.



Ce Grenelle de l'environnement est un véritable Munich de l'écologie

politique.
Munich de l'écologie politique car l'idée qu'une " Union sacrée " soit

possible autour du sarkozysme sous le prétexte de la défense de

l'environnement a finalement triomphé. Comme si l'écologie n'était pas

une affaire de choix de société avec nécessairement des perdants et

des gagnants : la grande question étant de savoir qui des pauvres ou

des riches paiera la crise écologique. Munich de l'écologie politique

car l'idée s'impose qu'on pourrait obtenir des avancées sans constuire

d'abord un rapport de force face à la puissance des lobbies

économiques et nucléocrâtes.
Ce Grenelle de l'environnement est une défaite de l'écologie que nous

paierons très cher.
Il retarde le moment où il faudra bien apprendre à vivre mieux avec

beaucoup moins ce qui suppose d'abord un autre partage des ressources

entre les riches et les pauvres.
Dans l'attente du grand soir promis par Sarkozy au nom de sa "

révolution verte " et de l'extinction durant cinq minutes de nos

ampoules électriques, souvenons-nous que le 22 avril 1970, vingt

millions d'américains avaient participé au " premier jour de la Terre

", qu'à cette occasion la 5e avenue de New York avait même été fermée

à la circulation.
Nous avons vu combien cette écologie des bons sentiments est un marché

de dupes.
Trente ans plus tard, les crises environnementales et sociales sont

encore plus dramatiques.
.
Que penser des mesures prises par le Grenelle officiel ?



On nous parle de geler les constructions d'autoroute et d'aéroports.

Cette promesse est un marché de dupes puisque si l'Etat s'est engagé à

ne plus augmenter significativement les investissements dédiés au

développement de nouvelles capacités routières et aéroportuaires, il a

immédiatement ajouté sauf en cas de contournement d'une agglomération,

sauf en cas de nécessité liée à un problème de sécurité, sauf en cas

d'intérêt local, etc. Que restera-t-il finalement des belles paroles

aux nom du réalisme économique ? On fera un peu moins d'autoroutes

mais on continuera à développer en priorité le TGV au détriment des

TER et de la nécessaire relocalisation de nos activités économiques et

de loisirs.


On nous promet une fiscalité verte

Cette promesse est un marché de dupes car le transfert d'une partie de

la fiscalité des entreprises sur le carbone aboutira à pénaliser

davantage encore ceux qui ont le moins : elle videra les routes des

voitures des plus pauvres pour que les riches puissent rouler plus

vite. Ce projet d'un bonus/malus a été accepté comme une divine

surprise comme si la crise écologique tenait avant tout aux vieilles

voitures polluantes des plus pauvres et non à la surconsommation des

plus riches et à un modèle de vie écologiquement insoutenable.



On nous promet une loi sur les OGM

Cette promesse est un marché de dupes car le gel annoncé n'est en rien

le moratoire exigé par les associations environnementales. Ce gel des

cultures de maïs Mon 810 durant l'hiver est une campagne de

communication pas gênante pour les bio-technologies puisqu'on ne sème

pas durant cette période. La loi annoncée est un véritable piège car

sous prétexte de liberté de faire ou de ne pas faire des OGM, elle ne

répond pas à la question posée par une majorité de français sur la

dangerosité des OGM mais aussi de choix d'une agriculture paysanne.

Elle entérine les solutions libérales sous forme de dommages et

intérêts en cas de pollution. Sarkozy le dit clairement : cette

suspension de la culture commerciale des OGM " ne signifie pas que

nous devons condamner tous les OGM, et notamment les OGM d'avenir ".

Le chef de l'Etat a même exprimé sa volonté d'accélérer encore plus la

recherche sur les OGM.
On nous promet plus de bio dans les écoles

Cette promesse est un marché de dupes puisque la réglementation

européenne généralise la bio-industrie contre la véritable agriculture

biologique : on n'avancera pas d'un pouce si les aliments bio

parcourent la planète avant d'arriver dans les assiettes de nos

enfants. Une vraie alternative est de revenir à une cuisine faite sur

place, avec des produits locaux, de saison et si possible " bio ".



On nous promet de moraliser la publicité

Cette promesse est un marché de dupes dès lors que l'Etat n'abroge pas

la circulaire Lang qui permet à la publicité de pénétrer dans les

écoles par les fenêtres tout en demeurant interdite, tant que l'Etat

ne respectera pas la loi en faisant démonter les panneaux illégaux,

tant que la publicité ne sera pas interdite à la télévision aux heures

où tant d'enfants sont devant le poste, tant qu'on n'inversera pas la

hiérarchie des normes juridiques en faisant primer le droit des

usagers sur celui des marchands en généralisant, par exemple, des

zones sans publicité.


On nous promet de diviser par deux les pesticides
Cette promesse est un marché de dupes car sitôt l'annonce faite que

cet objectif devrait être atteint en dix ans, on apprend que sous la

pression de la FNSEA la date butoir disparait.



Sarkozy a annoncé la convocation d'un autre Grenelle l'an prochain.

Chiche à la même date : nous organiserons de nouveau un

contre-Grenelle.


En attendant nous ne laisserons pas Sarkozy profiter de la présidence

française de l'Union européenne en juillet 2008 pour imposer à

l'Europe le retour au tout-nucléaire...
Face à une droite naturellement sarko-compatible

et à une gauche toujours plus sarko-compatible...

Nous disons que l'on ne peut vouloir à la fois plus de croissance et

plus d'écologie.
Face au Front National de Libération de la Croissance canal Attali,

nous rejettons l'objectif de 5 % de croissance par an car comme le

disait Attali en 1973 croire que la croissance puisse réduire les

inégalités sociales est une escroquerie intellectuelle.
Face à Florence Parisot et à Christine Lagarde qui veulent aller

chercher les derniers points de croissance avec les dents, nous

lançons un appel à boycotter la grande distribution notamment lors des

nocturnes commerciales et les dimanches.
Face à ceux qui choisissent de nourrir leurs voitures plutôt que six

milliards d'humains, nous exigerons le moratoire immédiat sur les

agro-carburants présenté hier à l'ONU par Jean Ziegler.



Paul Ariès

Co-organisateur du Contre-Grenelle de l'environnement

Rédacteur au journal la décroissance

Directeur de la rédaction du journal le sarkophage


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